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lundi 16 octobre 2023

Espérer...

 Il faut se savoir perdu pour vouloir être sauvé, il faut avoir plongé dans l’universelle fragilité pour qu’une telle horreur du noir la rende plus nécessaire que le pain quotidien, la Lumière, pour le découvrir comme la seule piste déchiffrable.

Ce sont nos misères sur terre qui le rendent indispensable, le Livre cachant le mystère à nos pauvres vies humaines ne se reçoit pour en devenir une expression nouvelle que dans les profondeurs vertigineuses de l’espérance.

Il faut, pour qu’elles opèrent en nous la divine transformation, ces paroles faites pour atteindre en nous des racines de corruption, un cœur dépouillé de toute confiance en l’homme. Tout don de Dieu ne se reçoit en somme que dans les profondeurs vertigineuses de l’espérance.

Il ne faut pas nous étonner de nos bouleversements intimes mais nous cramponner à elle comme à une corde au-dessus du double abîme, il ne faut pas arrêter sa chute au fond de nous-mêmes mais la laisser agir. La Parole de Dieu ne sème que dans les profondeurs vertigineuses de l’espérance

 Espérer d’une espérance totale, indescriptible, espérer même à plat ventre, à terre ou immobile, espérer même broyé par la souffrance d’homme, espérer et croire qu’elle a fait ce que nous sommes,

Les profondeurs vertigineuses de l’espérance.

Textes de Madeleine Delbrêl unis et adaptés Stéphanie Lefebvre

Extraits du CD « Missionnaire sans bateau » ADF-Bayard musique

dimanche 1 octobre 2023

Carmel...

Quelques mots posés comme des flocons dans un blanc silence…

 Le mystère du Carmel, la douceur et la profondeur de Marie… indissociables.

Le silence de l'Esprit couvre le Carmel de son ombre, le garde au creux du vivant secrètement…

 Mystère de silence, mystère d'un sourire de Dieu en sa Bien-Aimée, mystère d'Épouse…

 Secrètes noces de Lumière en la Ténèbre, non pas ténèbres d'obscurs maléfices qui noient le monde, mais promesse au ventre de la Mère, Ténèbre sainte où éclot l'Enfance…

Promesse d'Enfance qui met au monde Thérèse la petite, fait éclore la Madre, épouse Elisabeth, crucifie Jean et Thérèse Bénédicte…

 Vous en savez tellement plus que moi, frères et sœurs aimés, je ne fais qu'effleurer le silence, ce vertigineux silence qui nous appelle tous, qui nous respire peut-être, chacun de nous est un peu de ce souffle, ici, sur notre terre, inhalé et expiré par le Souffle, bercé par le pas tranquille de Marie, regardé par le Christ de la Crèche à la Croix, conduit par l'indicible, l'invisible lumière de la Résurrection…

Mystère des noces où la nuit devient lumière, simplement, discrètement…

L'humble Carmel délicatement voilé par l'amour de Marie…

Humble, pauvre, chaste, malgré les travers de notre humanité…

Chaque mot comme un flocon s'efface en un instant, humblement.

 

Juste le silence.

Le profond silence…

 

Nous le partageons.


samedi 26 novembre 2022

Avent 2022

Avent…
 
Qu'attends-tu dans le frais de cette nuit… Le vent chante à la lyre, il pleut des perles froides, de clairs nuages voilent la lune.
Qu'attendons-nous ?
La rumeur du monde crie à l'Apocalypse en en perdant le sens. Les mots sans racines flottent comme chimères au gré du net et agglomèrent les peurs. Oublié le Dévoilement, plus de Révélation, juste une survie à tous les prix, pour un an, deux peut-être, et puis… et puis ?
 
Qu'attends-tu…
Que faisons-nous de la promesse…
La vie offerte, la joie profonde, tellement autre, dont toute joie d'ici est l'image, la liberté toute entière née de la vérité, qu'en faisons-nous… ce chemin de tendresse, de partage, "un seul cœur et une seule âme", non pas en rêve mais en vie, non pas envie mais espérance…
Dévoilement… "Nous serons semblable à lui parce que nous le verrons tel qu'il est" (I Jean). Est-ce là ton attente ? Est-ce la mienne ?
En ce temps de Noël, quelle humble splendeur verrons-nous venir à nous ?
Quelqu'enfance renouvelée ? Quelqu'amour plus doux, plus fort ? Un peu plus de confiance offerte par la menotte d'un tout-petit ?
 
Et peut-être, enfin, comme une réponse à l'ardent désir de nos âmes, l'inestimable présent d'humanité… la nôtre et celle de notre "prochain"… Le Tout autre vient nous révéler toute la beauté de notre humanité en la faisant sienne, et c'est un enfant qui nous tend la main…
 
Où y a-t-il place pour la peur ? 
M.F. Les nuits de feu

dimanche 10 avril 2022

Le silence seul... Prière.


Ecrire ta beauté, nul ne le peut.

Ecrire ta grandeur, le silence seul…

Ecrire la vie, rien n'y suffit.

Alors, pourquoi écrire encore…

Se taire, se taire infiniment…

Laisser la page vierge.

Se faire page vierge.

Ecris, toi, écris !

Ecris ta vie en moi, étreins-moi de silence, coule-moi d'amour…

Que mon âme vaillante te loue,

Que mon cœur peineux te loue,

Que mes mains fatiguées te louent…

Sombre-moi en toi, infinie plongée au blanc, toutes amarres rompues,

Et ma vie laissée, ma vie bousculée, transfigurée, effacée en toi,

Mais la Vie enfin, enfin toute en moi par toi…

Le silence seul…




dimanche 13 décembre 2020

Visage...

J'écoute… Je laisse le silence s’écrire, tout doucement… le chant du poêle, le pas des chats… la beauté. Ta beauté. 

Vieillard, Rembrandt 
Ineffable. 

Simple... 

Il n’y a aucun apprêt dans Ta beauté. Tous les visages, tous les corps, jeunes, épuisés, agonisants, sont habités de Ta beauté ; ça se passe au-dedans, à fleur de peau… 

Je pense à M, cet homme au visage perdu, béant, qui resplendit de Toi sans que personne ne le remarque. C’est Ta main qui passe, qui touche ce visage, me touche le cœur. En même temps. Et se dévoile une beauté insoupçonnée, insoupçonnable peut-être… la sienne propre… Unique.

Irremplaçable.

Je ne sais pas qui il est : il ne peut plus me le dire, Tu ne peux pas le dévoiler, c’est un secret entre Toi et lui. Votre secret. Infiniment précieux, infiniment parfait…

Les mots ne servent qu’à tracer une fine ligne sur le sable blanc de la page. Une ligne à suivre. Il est inutile de comprendre, il faut juste regarder cette faible trace et la garder dans notre cœur. Et puis un jour, devant un visage défait, elle le griffera, ce cœur, et Ta beauté se révèlera…


dimanche 11 octobre 2020

Heureux... St Grégoire de Naziance

Heureux celui qui mène une vie solitaire, qui n’est pas mêlée à ceux qui marchent sur la terre, mais qui a divinisé son esprit. 
Heureux celui qui, mêlé à la foule des hommes, n’était pas un de leurs habitués, mais a envoyé tout son cœur à Dieu.
Heureux celui qui a acquis le Christ de préférence à tous les biens, et qui a pour seule richesse la croix, qu’il lève bien haut. 
Heureux celui qui gère honnêtement ses biens, et qui peut tendre la main de Dieu aux indigents. 
Heureuse la vie des bienheureux qui ne connaissent pas les liens, qui sont auprès de la pure Divinité, ayant renversé la chair d’une secousse. 
Heureux celui qui ayant un peu cédé aux lois du mariage, conduit la plus grande partie de son amour vers le Christ. 
Heureux celui qui exerçant le pouvoir sur le peuple, conduit le Christ aux mortels par des sacrifices saints et grands. 
Heureux celui qui étant l’enfant du troupeau, conduit, en parfait rejeton, à la patrie du Christ céleste. 
Heureux celui qui, grâce aux grands élans d’un esprit pur, contemple la splendeur des lumières célestes.
Heureux celui qui honore le Seigneur de ses mains qui ont beaucoup peiné, et qui est pour beaucoup une règle de vie. Toutes ces choses ont réalisé la plénitude des vases célestes, destinés à recevoir le fruit de nos âmes, chaque vertu conduisant dans un lieu. Car nombreuses sont les auberges des nombreux genres de vie. 
Heureux celui que le grand Esprit a révélé dépourvu de passions, celui qui a ici-bas une vie d'affliction, celui qui est toujours insatiable de la nourriture céleste, celui qui par sa douceur est l’héritier de grands biens, celui qui par ses entrailles attire sur lui la grande miséricorde de Dieu, ami de la paix, et pur de cœur, celui qui a supporté de nombreuses souffrances pour le Christ glorieux et qui obtiendra une grande gloire. 
Amen. » 

St Grégoire de Naziance

lundi 8 juin 2020

Parabole...


J'ai envie de te conter une histoire courte, un peu comme une image peinte en mon cœur depuis quelques jours, je ne sais pas pourquoi.

Vois un chemin. Un long chemin de poussière et de pierre blonde. Au bout du chemin, un puits, dans un paysage aride, de longues tables rocheuses coulées de lumière, de la lavande, du thym, des fleurs menues blotties en touffes claires au creux de la roche. Vers la gauche, le plateau ploie et s'emplit de terre rousse, de hauts murs enserrent une vigne féconde, taillée et rangée, où l'on s'active.
La lumière ruisselle sur les jeunes grappes et les baigne. Patiemment.

Le maître de la vigne passe souvent sur le chemin, avec sa mère. Il veille, il conseille, il étend sa vigilance à chacun, et à chaque cep. Nul n'est oublié, il n'est pas une grappe qu'il ne remarque et qu'il ne soigne lui-même quand les ouvriers sont occupés ailleurs. Sa mère l'accompagne, apporte à boire et à manger aux ouvriers, les écoute, les console, porte leurs doléances à son fils.
Au soir, ils restent souvent à parler au puits, puis ils prennent le chemin du retour.

Au bord du chemin, il y a une vigne sauvage, qui donne du petit grain pour les oiseaux. C'est là toute sa vocation, offrir un peu de nourriture et une ombre fraîche. Elle a poussé seule, on ne sait trop comment, dans la pierre. Il y avait du soleil, et comme elle l'a vu, elle a grandi vers lui parce qu'elle espérait sa clarté.
Elle regarde passer le maître de la vigne et elle l'aime : jamais il ne manque de s'arrêter auprès d'elle et de lui parler doucement. Son regard est soleil, sa parole est pluie bienfaisante, ses mains la guident vers plus de lumière, plus de chaleur, et parfois il rit, il cueille les grains petits et acides qu'elle offre aux oiseaux, il dit : " ils apaisent ma soif", il s'assoit à son ombre et se repose enfin, et elle étire ses sarments, elle appelle la brise, elle veille sur son sommeil... Et quand il s'éveille, il sourit, laisse les feuilles étroites effleurer son front, il dit aussi : "tu es un temps de ma liberté"...
Elle l'aime. Elle est sienne, la sauvage, parce qu'elle s'est donnée pour rien. Personne ne l'a plantée, personne ne l'a taillée, et là il rit encore : c'est moi qui t'ai plantée pour moi et pour les oiseaux, pour mon repos... pour rien d'important. C'est elle alors qui rit.

Quand il ne vient pas, sa mère verse sur la pierre un vase de l'eau du puits, fraîche et vivante, et la pierre la boit. Il en reste toujours un peu dans un creux, pour le bain des oiseaux. La vigne pose son ombre là, exprès, et l'eau demeure.

Un jour s'est levé un vent ardent en tourbillons. Il a balayé le plateau, brûlant la pierre et les fleurs claires. Les murs ont vacillé, le soleil s'est fait de feu, la terre a craquelé, les oiseaux se sont enfuis. Les ouvriers ont manqué à la vigne parce qu'ils étaient saisis dans cette tourmente et cherchaient à s'abriter. Ils n'avaient pas tous vocation de martyrs. La belle vigne tremblait en son clôt, les grappes trop lourdes séchaient sur pied, les feuilles jaunissaient. Toute l'eau du puits était pour l'irrigation, mais le vent furieux la buvait largement au passage. Le maître de la vigne avait prévenu, il avait appelé, mais les ouvriers n'avaient pas entendu, alors il était là, il travaillait comme chacun. Parfois, il levait les yeux sur la vigne de son repos, il lui souriait de loin, et elle frémissait, vaillante, elle pensait à lui, elle l'aimait d'autant plus qu'il ne venait plus vers elle, sa mère non plus, il n'y avait plus d'eau pour elle.
Le vent avait balayé ses feuilles et le petit grain noir qu'elle offrait aux oiseaux : elle était nue, ses sarments s'étiraient sur la pierre, dans leur faiblesse, mais elle souriait toujours au maître. Elle l'aimait. Il savait cela.

La belle vigne souffrait. Les grains fripés s'embuaient au froid de la nuit et perdaient leurs dernières forces. Les ouvriers désertaient parce que l'ouvrage était trop dur : ils étaient peu nombreux, les nuits étaient trop froides et les jours trop brûlants. Beaucoup s'en allaient.
Le maître les regardait, il leur remettait leur salaire, et même davantage. Il les bénissait.
Un matin, il est monté jusqu'au chemin, il s'est avancé vers la vigne sauvage, il s'est agenouillé devant elle, il a touché les sarments amaigris, il a dit "veux-tu ?" Il la regardait, elle était libre, elle avait le choix, elle a dit oui, alors, d'un coup, il a tranché le cep.

Mon frère, de son cœur a jailli une eau pure et un soupir. Jamais la source n'a tari. La belle vigne a mangé la vie de la vigne aux oiseaux. Les grappes fripées ont gonflé à nouveau.
Cette vie n'était pas pour elle, elle venait de lui, elle était pour lui.
Elle n'était rien d'important.

Quand il passe sur le chemin, il sourit. Il voit l'eau jaillissante, il en boit parfois, puis il s'éloigne avec sa mère.
 Jaloux est son nom M. Felix.

dimanche 19 avril 2020

Dieu seul peut...


Dieu seul peut créer, mais tu peux valoriser ce qu'il a créé,
Dieu seul peut donner la vie, mais tu peux la transmettre et la respecter.
Dieu seul peut donner la santé, mais tu peux orienter, guider, soigner.
Dieu seul peut donner la Foi, mais tu peux donner ton témoignage.
Dieu seul peut infuser l’Espérance, mais tu peux rendre la confiance à ton frère.
Dieu seul peut donner l’Amour, mais toi tu peux apprendre à l'autre à aimer.
Dieu seul peut donner la joie, mais tu peux sourire à tous.
Dieu seul peut donner la force, mais toi tu peux soutenir un découragé.
Dieu seul est le chemin, mais tu peux l'indiquer aux autres.
Dieu seul est la lumière, mais tu peux la faire briller aux yeux des autres.
Dieu seul est la vie, mais tu peux rendre aux autres le désir de vivre.
Dieu seul peut faire des miracles, mais tu peux être celui qui apporte les cinq pains et les deux poissons.
Dieu seul pourra faire ce qui paraît impossible, mais tu pourras faire le possible.
Dieu seul se suffit à lui même mais il a préféré compter sur toi !
Père Guy Gilbert

mercredi 25 décembre 2019

Noël... E. Maréchal

Jésus, là où tu es né, ta crèche n'était pas fermée.
Tu as voulu que tout le monde puisse venir Te voir, parce que Tu es venu pour tout le monde.

Avant que Tu naisses, Jésus,
Joseph et Marie n'avaient trouvé que des maisons aux portes fermées : fermées au secret de Dieu.
Ils ont trouvé ouverte une étable, une pauvre étable…

Aujourd'hui, Jésus,
Tu ne nais plus dans une étable ; mais Tu veux naître, dire le secret de Dieu dans toutes les maisons, dans tous les cœurs.

Tu veux déposer le baiser de Dieu sur tous les visages.
Tu veux des millions de crèches pour habiter le monde.
Tu veux des millions de cœurs pour donner ta paix sur la terre.
Tu veux des millions de visages pour donner la paix de Dieu.
Tu veux des millions de Noëls pour donner ton Noël.

Jésus, viens ouvrir nos maisons et nos cœurs pour dire avec Toi :
Gloire à Dieu, notre Père !

Elie Maréchal

dimanche 15 décembre 2019

Mon Dieu... M. Daniélou

Madeleine Daniélou


Mon Dieu,
Je T'offre cette année qui commence.
C'est une parcelle de ce temps si précieux que tu m'as donné pour Te servir.
Je la mets sous le signe de la fidélité :
Fais qu'elle soit une longue ascension vers Toi et que chaque jour me trouve plus riche de foi et d'amour.

Mon Dieu,
Je T'offre tous ceux que j'aime.
Ne permets pas que je leur fasse défaut, mais plutôt que je sois pour eux le canal invisible de ta grâce et que ma vie leur manifeste ton amour.

Mon Dieu,
Je T'offre aussi l'immense douleur de ce monde que tu as créé et racheté :
Les souffrances des enfants innocents, le long ennui des exilés, l'angoisse des chefs, et ce poids qui pèse si lourdement sur tous.

Mon Dieu,
Qu'une étincelle de ta charité éclate en nos ténèbres et que l'aube de la paix se lève en cette année.

Je Te le demande en union avec tes saints, avec ton Eglise, avec ton Fils, Jésus-Christ, prince de la Paix.

Madeleine Danielou

dimanche 12 mai 2019

Mois de Marie...


Je voudrais chanter, Marie, pourquoi je t'aime,
Pourquoi ton nom si doux fait tressaillir mon coeur
Et pourquoi la pensée de ta grandeur suprême
Ne saurait à mon âme inspirer de frayeur.
Si je te contemplais dans ta sublime gloire
Et surpassant l'éclat de tous les bienheureux
Que je suis ton enfant je ne pourrais le croire
Ô Marie, devant toi, je baisserais les yeux !...
...
Tu nous aimes, Marie, comme Jésus nous aime
Et tu consens pour nous à t'éloigner de Lui.
Aimer c'est tout donner et se donner soi-même
Tu voulus le prouver en restant notre appui.
Le Sauveur connaissait ton immense tendresse
Il savait les secrets de ton cœur maternel,
Refuge des pécheurs, c'est à toi qu'Il nous laisse
Quand Il quitte la Croix pour nous attendre au Ciel.
...
Bientôt je l'entendrai cette douce harmonie
Bientôt dans le beau Ciel, je vais aller te voir
Toi qui vins me sourire au matin de ma vie
Viens me sourire encor... Mère... voici le soir !...
Je ne crains plus l'éclat de ta gloire suprême
Avec toi j'ai souffert et je veux maintenant
Chanter sur tes genoux, Marie, pourquoi je t'aime
Et redire à jamais que je suis ton enfant !...
                                                                      Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus

dimanche 21 avril 2019

"Qu’est-ce que le Printemps" Marie Noël










Alléluia ! Fais, ô soleil, la maison neuve ! 
Mes sœurs, que chacune se meuve
Avec des mains de ménagère et des doigts gais…
C’est Pâques ! Jetons hors les poussières obscures, 
Frottons de sable fin les clefs et les serrures, 
Pour que la porte s’ouvre en paix. 

Cirons doux, cirons vif les battants des armoires, 
La fenêtre en rit dans leurs moires ! 
Frottons ! Qu’elle se mire au luisant du parquet. 
Vêtons-lui ses rideaux de fraîche mousseline…
Quel ouvrage ! A-t-on cuit le gâteau d’avelines
Et mis sur la table un bouquet ? 

Alléluia ! Nous avons fini d’être mortes, 
De jeûner, de fermer nos portes, 
Le cœur clos et gardé par les effrois pieux. 
Le Prêtre a délivré la flamme et les eaux folles, 
Notre âme sort et s’amuse dans nos paroles
Et notre jeunesse en nos yeux.

Ouvre tout grand la porte à la Semaine Sainte. 
Mon cœur en moi sautille et tinte
Ainsi qu’une clochette en or vif qui se tut
Et s’en revient de Rome après les temps mystiques
Me donner l’envolée et le ton des cantiques
Pour l’allégresse du salut. 

Mais avec ma corbeille il faut que je m’en aille
Chercher les œufs frais dans la paille…
Aux vignes d’alentour ont fleuri les crocus
En rondes d’or et tenant leurs mains verdelettes
J’ai vu dans les fossés des nids de violettes
Et des coucous sur les talus. 

Les poules ont pondu très loin dans la campagne. 
Dans le matin qui m’accompagne ? 
Venez-Vous-en seul avec moi, mon Bien-Aimé…
Quelle parole avant d’y penser ai-je dite ? 
Où donc est ce Bien-Aimé-là, dis, ma petite ? 
Qui d’un tel Nom as-tu nommé ? 

Est-ce Jésus, ô moi qui ne connais point d’homme ? 
Le Dieu martyr que dans Son somme
Hier nous avons veillé toute la nuit au cœur, 
Pleurant d’amour sur Son tombeau, de deuil voilées ? 
Est-ce le Printemps doux et ses graines ailées
Qui nous a soufflé dans le cœur ? 

Mon bien-aimé, ce n’est qu’un mot, ce n’est personne. 
Mais de l’avoir dit je frissonne
Et je suis parfumée et je suis en rumeur
Comme une fiancée au roi qui l’aime offerte, 
Je frémis et me sens comme la terre, ouverte
Toute grande aux pieds du semeur. 

Quel germe au loin flottant va me voler dans l’âme ? 
Quel est le grain qu’elle réclame
Pour être avec les fleurs une fleur de l’été
Et pour porter des fruits quand passera l’automne ?… 
Il est doux, invisible et léger, il chantonne
A travers le vent enchanté.

Qu’est-ce que le Printemps, ô Jésus, mon doux Maître ? 
L’Ange des révoltes peut-être
Qui change d’un regard et la terre et les eaux
Pour me séduire et m’agite neuve et rebelle, 
Moi qui devrais vous être une calme chapelle
Ainsi que l’herbe et les rameaux. 

Ah ! De lui maintenant pourras-tu me défendre ? 
Ô Christ, il Te fallait l’attendre
Sur ta Croix de salut tous les jours sans guérir
Et me faire couler sur le cœur, de Tes plaies, 
Ton sang, pour que cherchant Tes épines aux haies, 
A Tes pieds j’adore mourir. 

Mais ce matin que l’Ange a remué la pierre, 
Ô Toi debout dans la lumière, 
Ressuscité de l’aube aux pieds couleur du temps, 
Toi qui dans le jardin as rencontré Marie
Que feras-Tu, jardinier de Pâques fleuries, 
Pour me défendre du Printemps ? 

 Marie Noël